Il y a des lustres et des lustres qu’à chaque année se tient une semaine
de prière pour l’unité des chrétiens
avec un résultat plus que mitigé. Où
en sommes-nous aujourd’hui ? J’ai
l’impression que nous vivons une
certaine lassitude à ce sujet. L’ordi-nation d’anglicans passés au catholicisme risque de réveiller de vieux
soupçons de maraudage, de mépris.
Après tant d’années, je suis d’avis
qu’il nous faut repenser le tout de
fond en comble ! Et si nous partions
d’une autre façon de penser !
Au lieu de considérer l’existence
de plusieurs Églises comme une
catastrophe, si nous y voyions une
chance pour l’Évangile ? En effet,
chaque rupture ou schisme au cours
de l’Histoire est toujours venu à
la suite d’une longue période d’ai-
greurs mutuelles, d’endurcissement
et d’obstination de la part de notre
Église souvent prétentieuse et des
autres Églises souvent en réaction
devant l’attitude romaine. Et si nous
avions osé considérer les question-
nements des autres Églises comme
des appels à se convertir davantage
à l’Évangile au lieu de brandir les
menaces d’excommunication, si
nous avions recherché le consensus,
le compromis, et si nous avions vu
la diversité des traditions comme
des chances pour l’Évangile de s’ac-
culturer au lieu de revendiquer sa
suprématie, notre Église se serait
enrichie de toute une somme d’ex-
périences spirituelles et ecclésiales !
L’apôtre Paul, dans sa première
épitre aux Corinthiens, au chapitre
1, rappelle que nous appartenons
tous au Christ et qu’entre nous, il
ne saurait y avoir des divisions et
des disputes. Le Christ est porteur
de l’Évangile du Royaume. La lu-
mière du Christ franchit le prisme
de l’Évangile et se décompose en
différentes couleurs comme celles
du spectre solaire. L’Évangile est
vécu et acculturé par différentes
communautés qui lui donnent une
couleur particulière. Les différentes
traditions chrétiennes (celles des or-
thodoxes, celles provenant des dif-
férentes traditions protestantes…)
viennent nous rappeler la richesse
du message chrétien. Au lieu de
voir cette situation comme une ca-
tastrophe, pourquoi ne pas la voir
comme une chance de faire rayon-
ner l’Évangile, le message de salut
dans toute sa diversité d’appropria-
tion spirituelle et culturelle ? Nous
avons donc toute une nouvelle ap-
proche à considérer devant la ques-
tion de l’oecuménisme aujourd’hui.
Ce mot d’origine grecque signifie
MAISON habitée ensemble, maison
commune. Il s’agit ici de la maison
du Père éternel. Nous sommes tous
en route vers cette maison, mais
nous n’en sommes pas les gestion-
naires mais les… invités ! Considé-
rons alors les membres des autres
communautés chrétiennes comme
des soeurs et des frères qui sont en
route, tout comme nous, vers la
maison où le Père nous attend.
Au sein de notre propre Église catholique, nous avons une immense
conversion à vivre : tout en étant
fiers de notre tradition ecclésiale
malgré ses dérives nombreuses tout
au long de l’Histoire, nous avons
à repenser notre approche concernant la question du rôle de Pierre
que tient le pape assisté de tous ses
collaborateurs. Le rôle de Pierre
est-il symbole d’unité ou d’unifor-mité ? Deuxièmement, ce rôle est-il
celui d’un frère qualifié, d’un père
plein de tendresse et d’accueil de
celui qui est davantage porté sur la
condamnation : Affermir ses frères
ou les refouler ?
En 1910 se tenait à Édimbourg
la première conférence des Églises
protestantes et depuis, bien des tentatives sont apparues pour favoriser l’unité des Églises. En 1948, à
Genève, était fondé le Conseil oecuménique des Églises auquel s’est
jointe notre Église catholique seulement en l962 ! Et depuis lors, beaucoup de rapprochements ont été
réalisés, mais il y a encore loin de la
coupe aux lèvres sur le chemin de
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DE L’EXPÉRIENCE
CHRÉTIENNE
Pierre-Gervais Majeau, prêtre-curé, Diocèse de Joliette, Québec
Je vous exhorte, frères, par le nom de notre Seigneur Jésus Christ,
à tenir tous un même langage, et à ne point avoir de divisions
parmi vous, mais à être parfaitement unis dans
un même esprit et dans un même sentiment.
(1 Corinthiens 1, 10)